La finale de la Ligue des Champions UEFA 2022 a fait -et fera- couler beaucoup d’encre…En attendant la restitution d’un travail sérieux d’enquête -qui par définition prendra quelques semaines- il est possible de poser un regard technique sur les faits. En reprenant les quatre domaines classiques de la sécurité, il est possible de constater un mélange d’ingrédients qui pouvait avant la rencontre être identifié comme porteur d’un niveau de difficulté élevé dans la constitution du dispositif mais aussi dans sa mise en œuvre.
Le site :
Le Stade de France est un lieu habituel de rencontre de football dans une jauge importante (80000) mais maitrisée. A priori, les équipes en place aussi bien pour la sécurité privée (pré-filtre en amont, contrôle d’accès) que pour les forces de l’ordre (surveillance) sont rodées à l’exercice. Un effet Covid de « perte d’habitude » a pu jouer.
Le contexte local « d’une délinquance d’opportunité » est lui aussi connu même si la crise Covid en a réduit l’ampleur en dehors des cités, le nombre de manifestations s’étant réduite fortement.
Concernant la manifestation, il s’agit de gérer des foules de spectateurs venant paisiblement assister à un match de football et pas d’un émeute préparée nécessitant a priori un maintien de l’ordre puissant.
La question de la mise à l’écart des personnes porteuses de billets litigieux semble avoir posée problème, bloquant le reste de la foule et la mettant en danger.
Un élément dont il faudra mesurer les effets réels est la grève du RER B modifiant la configuration des flux de spectateurs en réduisant les accès possibles. La fluidité des mouvements de la foule semble s’être interrompue, créant des points de fixation propices à accidents.
Les publics :
La présence de deux clubs iconiques du football mondial Real de Madrid – Liverpool FC et la proximité physique accrue du fait de la délocalisation du match de Saint Pétersbourg à Paris a créé un afflux de foule sans billet identifié et annoncé -même par les médias- 72h avant la rencontre (création de deux fan-zones dédiées aux Anglais et au Espagnols.
Sur ce type de match (demande très forte), la revente de billet est constante, créant l’apparition de faux titres d’accès. C’est un classique du genre (vu sur de nombreux autres sites) auquel il est possible de faire face si le dispositif technique est opérant (lecteur en place, manié par des personnels disposant de référents alentour pour envoyer les « cas à problème » en dehors de la file d’attente) et les personnels en contrôle d’accès formés.
Concernant les comportements individuels des supporters de football -anglais mais pas que- ils ne constituent pas une surprise, ni dans le stade ni dans les transports. Depuis fort longtemps et par exemple pendant l’Euro 2016 en France, on a observé des spectateurs actifs, certains d’entre eux pouvant dépasser assez rapidement les limites de ce qui est acceptable. Ils doivent être neutralisés, ce qui n’est pas simple dans une foule importante.
Les animations :
La finale ne prévoyait pas d’éléments particuliers, ni nouveaux, ni porteurs de difficultés (spectacle pyrotechnique par exemple) si ce n’est une animation en musique avant le match.
Rien n’était prévu après la rencontre pour étaler le départ du public.
L’environnement socio- politique :
Si le risque attentat est toujours présent, il ne constitue pas une nouveauté, notamment en Ile-de-France. Le risque sanitaire Covid n’a eu aucun effet sur l’organisation, l’ensemble de mesures en place pendant la pandémie ayant été levée.
De même, les conditions météorologiques ont été très bonnes et n’ont pas contribué aux difficultés.
Au final, les ingrédients -somme toute classiques- d’un grand évènement sportif seront à analyser dans le calme, loin des interprétations hâtives plus ou moins partisanes.
Si le mécontentement de certains spectateurs est compréhensible -qui nécessite des excuses voir des compensations, rien n’oblige à des prises de position univoque de responsables, rapidement déjugées par les faits avérés. Par le passé, beaucoup de dirigeants politiques ou sportifs en précipitant leur prise de position se sont obligés à des rétropédalages douloureux. En laissant retomber la passion -compréhensible-, on opérera une analyse bien plus utile pour l’avenir et notamment les grands évènements sportifs, culturels et festifs à venir.
Le lien vers un article de l’indépendant
Le lien vers un article du Monde (avec vidéos)
Le lien vers l’audition parlementaire des deux ministres concernés